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LA COSMÉTOLOGIE RÉGÉNÉRATIVE 

Lorsque la médecine régénérative rencontre la cosmétologie et si c’était l’inverse ?  Mode ou avant garde ? Pour mieux y répondre petit tour d’horizon sur ce qu’est réellement la médecine régénérative.

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La médecine régénérative est une approche aussi ancienne que récente, pleine de promesses puisqu’elle consiste par exemple à réparer une lésion ou un organe malade, en remplaçant les parties endommagées par un nouveau tissu cellulaire…

Il faut savoir que le vieillissement des cellules de l’organisme est inéluctable. Néanmoins, elles sont capables de véritables prouesses biologiques et certains de nos organes peuvent se régénérer tels que la peau !

Quelques dates clés... 

1869 : première greffe de peau sur une plaie ouverte au bras 
1900 : développement des transfusions intraveineuses 
1960 : découverte des cellules souches hématopoïétiques 
1981 : découverte des cellules souches embryonnaires 
1998 : première culture de cellules souches humaines 
1999 : introduction du terme de médecine régénérative 
2001 : découverte de cellules souches dans la graisse qui permet une amélioration de la qualité des tissus lors d’une greffe 
2012 : fabrication d’un implant rétinien qui permet à plusieurs patients de retrouver partiellement la vue 
2014 : greffe de cellules cardiaques issues de cellules souches chez une patiente victime d’un infarctus du myocarde…

Tandis que l’homme explore le cosmos, lance des sondes aux quatre coins de la galaxie - sur des astéroïdes même - pour chercher des indices de l’origine de la vie. Il étudie l’infiniment grand pour expliquer son existence. Mais si la promesse de l'éternité n’était pas dans l’intiment petit ?

En effet puisque la médecine régénérative se situe généralement dans le monde du « nano ».  Voici quelques exemples des applications de la médecine régénérative. 

— La thérapie cellulaire 

La thérapie cellulaire consiste à greffer des cellules afin de restaurer la fonction d’un tissu ou d’un organe, on parle de transplantation de cellules souches.

Il y a plusieurs types de cellules souches, elles peuvent se distinguer selon leur potentiel de différenciation, c’est-à-dire, leur capacité à générer des types de cellules.

Ces cellules souches peuvent s’autorenouveler et donner naissance, selon l’endroit où elles se trouvent, à d’autres cellules qui peuplent nos tissus et le rendre sain. 

— La thérapie génique 

La thérapie génique a pour but de corriger les défauts génétiques d’une ou de plusieurs cellules, soit pour restaurer une fonction défectueuse, soit pour en apporter une nouvelle en faisant pénétrer des gènes dans les cellules ou les tissus d'un individu pour traiter une maladie. 

La médecine régénérative est souvent confondue avec l’ingénierie tissulaire, ces deux disciplines font toutes deux référence à la réparation, à l’entretien et à la restauration des tissus biologiques. 

L’ingénierie tissulaire étudie la croissance des tissus à l’extérieur du corps, alors que la médecine régénérative examine les moyens d’utiliser les techniques d’ingénierie tissulaire dans un environnement médical pour réparer des tissus à l’intérieur du corps. 

Quelle est la place de la médecine régénérative dans la cosmétologie ? 

— Nous pouvons parler des tests salivaires permettant d’adapter la composition d’une crème

— Les nouveaux soins à bases de pré et probiotiques axant sur le rééquilibrage de la barrière cutanée comme source de régénération

— La cosmétologie adaptative comme les formulations en fonction de l’état de santé de la peau

— Les soins comprenant du « media conditionné » dérivé de culture de cellules souches avec comme promesse de relancer le bon dialogue entre les cellules cutanées

— Les crèmes comprenant son propre SVT« Stromal Vascular Tissue »

— Le sérum composé de son propre PRP stabilisé 

….

Sans oublier l’utilisation des exosomes dans la cosmétologie régénérative. 

En effet plusieurs études confirme que le mécanisme d'action des CSM ( cellules stromales mésenchymateuses ) est dû à l'effet paracrine plutôt qu'au remplacement direct en déplaçant les cellules souches vers les cellules ou tissus endommagés. 

C’est ainsi que nous allons nous intéresser aux exosomes qui sont des nanosicules endogènes (30-200 nm) libérées par presque toutes les cellules qui contiennent un large éventail de biomolécules (microARN, protéines, lipides et autres molécules de signalisation) liées aux fonctions associées au type de cellule. 

Il a été démontré que les exosomes dérivés des cellules souches mésenchymateuses conservent la capacité de régénération tissulaire des cellules souches en jouant le rôle de médiateur clé de l'effet paracrine des CSM.

En effet les exosomes de cellules souches mésenchymateuses (CSM) en raison de leurs propriétés régénératrices et immunomodulatrices vont jouer un rôle important dans la réparation et la régénération de la peau.

Largement considérés comme des vecteurs d'information entre les cellules, les exosomes sont des acteurs actifs participant à l’homéostasie agissant comme effecteurs biologiques dans de nombreux processus physiologiques. Ils sont perçus comme nouveaux outils thérapeutiques atténuant les limites et les freins liés à l'administration de cellules souches.

Quelles utilisations dans la cosmétologie ? 

— Les exosomes et la dermatite atopique —

La dermatite atopique  est une maladie inflammatoire de la peau chronique, récurrente et très prurigineuse qui réduit considérablement la qualité de vie. 

De nombreux types de thérapies ont été utilisés dans le traitement, comme les stéroïdes, les immunosuppresseurs et les produits biologiques, qui se sont concentrés sur la réduction des réponses immunitaires à médiation Th2 (hypothèse inside-outside). Cependant, dans la physiopathologie de cette maladie, le rôle critique de la couche cornée (hypothèse outside-inside) a également été étudié. 

Par conséquent, une nouvelle approche thérapeutique impliquant la réparation des barrières cutanées est une méthode évolutive dans le traitement de la dermatite atopique. 

Bien que le mécanisme d'action des exosomes dans ce traitement ne soit pas entièrement compris, on suppose que la réduction de l'inflammation systémique et la restauration de la fonction normale de la barrière épidermique jouent un rôle bénéfique. 

— Les exosomes et le traitement des cicatrices —

Les thérapies à base de cellules souches mésenchymateuses suscitent beaucoup d'intérêt pour le traitement des cicatrices.

Cependant, de nouvelles preuves ont montré que les CSM présentent des inconvénients, comme l'immunogénicité. 

Le besoin d'un traitement sans cellules ayant émergé, la possibilité d'utiliser des exosomes pour le traitement des cicatrices a été notée. De nombreuses études ont montré le potentiel des exosomes dans le traitement des cicatrices en utilisant des méthodes in vitro et in vivo. Zhao et al. ont montré au travers d'une étude que les exosomes favorisent la migration et la prolifération des fibroblastes in vitro et atténuent le dépôt de collagène.

Dans la même étude, des expériences in vivo sur des animaux ont montré que les exosomes facilitaient le processus de cicatrisation des plaies avec des fibres de collagène bien disposées…

De plus, les exosomes améliorent l'angiogenèse via la voie Wnt4/ β-caténine. Zhang a montré que les exosomes favorisent la translocation nucléaire de la β-caténine, augmentent l'expression de l'antigène nucléaire des cellules proliférantes, de la cycline D3, de la N-cadhérine et de la β-caténine, et diminuent l'expression de la E-cadhérine....

— Les exosomes et l’alopécie — 

L'alopécie ou la perte de cheveux est une affection courante. Il existe une grande variété d'options de traitement de l'alopécie, notamment le minoxidil topique, le finastéride oral, la luminothérapie de faible intensité, l'injection de plasma riche en plaquettes, le microneedling et la transplantation de cheveux... Récemment, les exosomes dérivés de diverses ressources tissulaires ont retenu l'attention en tant qu'options thérapeutiques potentielles pour l'alopécie en raison de leur capacité de régénération et de leur aptitude à promouvoir la différenciation cellulaire...

— Les exosomes et l’hyper-pigmentation —

Le mélasma est un trouble hyperpigmentaire courant qui se manifeste par des macules et des taches asymétriques, irrégulières... 

Diverses méthodes de traitement du mélasma ont été mises au point, mais aucune ne s'est avérée suffisamment efficace pour être considérée comme la référence.

Des études antérieures ont montré que les CSM ont le potentiel de traiter l'hyperpigmentation grâce à leurs effets inhibiteurs et anti-mélanogéniques sur les mélanocytes épidermiques. 

Parallèlement, des études récentes ont indiqué que les exosomes sont associés au développement de la couleur de la peau et aux interactions entre mélanocytes et kératinocytes. -Cicero et al. ont montré que les exosomes sont associés à l'expression non seulement de l'activité de la tyrosinase, une enzyme clé dans la biosynthèse de la mélanine, mais aussi des gènes de la pigmentation. Takano et al. ont signalé que les exosomes sont substantiellement impliqués dans le contrôle du développement de la couleur de la peau humaine in vivo…

— Les exosomes et le rajeunissement — 

Le vieillissement de la peau est un processus complexe comprenant un vieillissement intrinsèque et extrinsèque. 

Le vieillissement extrinsèque, également appelé photovieillissement, est principalement causé par l'exposition cumulative aux rayons ultraviolets (UV). 

Il en résulte des altérations des composants de la matrice extracellulaire dermique (MEC), telles que la dégradation des fibres de collagène et d'élastine. Plusieurs études ont démontré que les facteurs paracrines des cellules souches, notamment le VEGF, le TGF-β et les MMP, peuvent favoriser la synthèse de l'ECM et exercer des effets bénéfiques sur le vieillissement de la peau.

Par conséquent, des études sur les effets anti-âge des exosomes sur la peau ont également été menées. Dans une étude de Oh et al. les exosomes ont diminué la surexpression de MMP-1/3 et de la β-galactosidase associée à la sénescence et ont favorisé la synthèse du collagène de type I. 

De plus, Liang et al. ont démontré que l'injection sous-cutanée d'exosomes dérivés d'ASC augmentait l'expression du collagène de type I et inhibait la surexpression de MMP-1/3 dans la peau de rat photovieillie.

Dans un modèle de rat, ils ont également montré que les exosomes injectés diminuaient significativement l'épaisseur de l'épiderme et augmentaient l'épaisseur du derme 7 jours après le traitement. 

De plus, Wang et al. ont rapporté que les exosomes dérivés de l'ASC pouvaient améliorer les dommages cellulaires à l'ADN induits par les UVB et la surexpression de ROS et de MMP-1 via la régulation du facteur 2 lié au facteur nucléaire E2 (Nrf2) et la voie de signalisation MAPK/AP-1.

— Les exosomes dans  l’intégrité de la barrière cutanée et la régulation de l’inflammation — 

Les exosomes dérivés de cellules souches mésenchymateuses dérivées de tissus adipeux humains (exosomes ASC) atténuent les symptômes de la dermatite atopique en réduisant les niveaux de plusieurs cytokines inflammatoires. 

Il a été étudié les effets des exosomes ASC sur la restauration de la barrière cutanée en analysant le contenu en protéines et en lipides. Il est est constaté que l'injection sous-cutanée d'exosomes d'ASC dans un modèle de dermatite induite par l'oxazolone a remarquablement réduit la perte d'eau transépidermique, tout en améliorant l'hydratation de la couche cornée (SC) et en diminuant de façon marquée les niveaux de cytokines inflammatoires telles que IL-4, IL-5, IL-13, TNF-α, IFN-γ, IL-17 et TSLP, le tout de façon dose-dépendante. De manière intéressante, les exosomes ASC ont induit la production de céramides et de dihydrocéramides. 

L'analyse au microscope électronique a révélé une augmentation des corps lamellaires épidermiques et la formation d'une couche lamellaire à l'interface du SC et du stratum granulosum avec le traitement aux ASC-exosomes. L'analyse du séquençage de l'ARN profond des lésions cutanées a démontré que les ASC-exosomes restaurent l'expression des gènes impliqués dans la barrière cutanée, le métabolisme des lipides, le cycle cellulaire et la réponse inflammatoire dans la zone touchée. 

Les résultats suggèrent que les exosomes ASC restaurent efficacement les fonctions de barrière épidermique  en facilitant la synthèse de novo des céramides, ce qui constitue une option  prometteuse pour la restauration  de la barrière cutanée…

Un avenir entre cosmétique et régénération se dessine et sa nécessité grandit. Il y a encore beaucoup à faire, mais la cosmétique régénératrice fait de plus en plus écho dans une société où les consommateurs s’informent et prennent conscience que le corps possède toutes les cartes pour se régénérer …

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Bibliographie — 

> Exosomes as novel player in dermatologic field «  Dermatologic Therapy Wiley » 

> Exosomes from Human Adipose Tissue-Derived Mesenchymal Stem Cells Promote Epidermal Barrier Repair by Inducing de Novo Synthesis of Ceramides in Atopic Dermatitis « PubMed » 

> Exosomes derived from human adipose tissue-derived mesenchymal stem cells for the treatment of dupilumab-related facial redness in patients with atopic dermatitis: A report of two cases « Journal of Cosmetic Dermatology » 

> Advances in Analysis of Biodistribution of Exosomes by Molecular Imaging « PubMed » 

> Combination Treatment with Human Adipose Tissue Stem Cell-derived Exosomes and Fractional CO2 Laser for Acne Scars: A 12-week Prospective, Double-blind, Randomized, Split-face Study. « Europe PMC » 

> Toxicological evaluation of exosomes derived from human adipose tissue-derived mesenchymal stem/stromal cells « ScienceDirect » 

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